Quelque part dans Macaron (7)



[...]

« …Car les cons prédisent toujours les défaites… ».

Il fut interpellé par la phrase.  Spontanément, il songea au journal l’Equipe qui avait fustigé Aimé Jacquet, le sélectionneur de l’équipe de France de football, durant près des deux années qui précédèrent le 3 à 0 des Bleus de Zidane contre le Brésil en 1998.  Oiseaux de malheur.  Ils ne cessaient dans leurs colonnes de dénoncer la méthode, de se gausser du personnage, de prévoir les pires difficultés à cette équipe jugée trop défensive.  Aimé Jacquet les avait fait mentir sur le terrain.  Posture impitoyable de qui se mêle de vouloir forger les opinions du peuple.  Nécessaire défaut dans la cuirasse de bonnes intentions de qui prétend vouloir embrasser la carrière journalistique.  Prédire le pire.  Particulièrement en matière de sport.  Le pire est toujours tellement plus probable, tellement plus vendeur.  Pas tellement plus facile à entrevoir, souvent, mais surtout tellement facile à couvrir, ensuite.
Certains médias et malheureusement certains politiques, pensent que dans le fait de prévoir une catastrophe, ils seront glorifiés d’avoir prévu, (dans le sens « fait action de prévoir ») et d’avoir prévu juste, et que l’on oubliera ensuite plus ou moins la catastrophe en elle-même.  Macaron, pour la première fois depuis des lustres, eut soudain un éclair de génie :
« Pourtant c’est ce que tu fais tous les jours dans ta vie, imbécile ! », lui souffla alors sa petite voix intérieure.
-          Quoi, de prévoir le pire ?
-          Oui, tous les jours, mon vieux !  ça commence quand tu fermes la porte à clé parce que tu as peur de te faire cambrioler !  quand tu es tellement dominé par la peur de perdre quelqu’un de cher que tu te comportes exactement comme il faut pour le faire fuir !  quand tu dénonces des jeunes visiblement blessés à la police plutôt que de téléphoner aux secours ! dominé par la peur de te prendre une caillasse !  Tu crois pas qu’il serait temps de prévoir le BIEN ?!  Rappelle-toi le concept de Tolkien, ce mot intraduisible en français, the eucatastrophy.  Un brusque et heureux dénouement à une affaire mal engagée.  Merde !  Et si c’était ça l’avenir ?  Un Monde pacifié ?  De l’amour et de l’art partout sur la planète ! Une science qui rebondit, une éducation qui réussit !
Un nouvel amour dans ta vie si mal en point !  Patience !
-          Arrête… arrête de te foutre de ma gueule.  Tu m’emmerdes avec ce positivisme à la con.  Regarde ma vie !  Contemple les abîmes vers lesquels je plonge chaque jour davantage, accepte comme moi d’avoir déjà atteint depuis longtemps le sommet de la montagne, accepte d’être en train de redescendre à bon train jusqu’à ta mort ! 
-          Mais cesse donc d’envoyer des flots de mauvaises ondes sur ta vie !  Souviens-toi l’enseignement de la mécanique quantique : la Nature se comporte différemment selon l’observateur et les conditions d’observation !  Si tu regardes la vie à travers un prisme négatif, en réalité, tu l’incites à se comporter négativement !  Demande à la Nature d’être positif, sois positif avec elle, et elle le sera avec toi en miroir.  C’est pourtant pas compliqué, merde, la physique des particules !
-          J’en sais rien.  J’ai aussi vécu des périodes de ma vie où je n’envoyais que des bonnes ondes, et pourtant j’ai récolté beaucoup de désillusions en retour…
-          Oh, c’est toi qui m’emmerdes !   Moi, je sens qu’il se passe quelque chose.  L’activité du Soleil est inhabituelle.  Elle pulse de manière erratique.  Il y a souvent des objets électriques qui grésillent, souvent ensemble.  Il y a du magnétisme dans l’air.  Quelque part sur cette planète, l’effet papillon d’une pensée positive se matérialise, sans que tu le saches encore, si ce n’est de manière inconsciente, en une ravissante personne qui va partager ta vie.  Elle est là, déjà, elle existe, elle a des yeux comme des belles boules de billard américain brunes.  Elle se dandine, elle chante.  Le soleil chante.  »

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