Don't Look Up


 Deux silhouettes assises, de dos, masculines, cheveux courts, costume que l'on devine de bonne coupe, tombé élégant du pantalon sur une chaussette en laine d'Ecosse et une chaussure Vuitton qui s'agite, pointe en haut, pointe en bas...  L'un des deux a une allure un poil plus excentrique, il porte une sorte de foulard que l'on devine bouffant, violet, sombre, tissé de fils d'argent qui captent merveilleusement la lumière le long du terminateur, un nez sévère, et le contour de son ombre se découpe en des cheveux bouclés, un peu plus longs, en bataille.

Deux voix, l'une assez grave, celle du présentateur du journal ou un truc du genre.  Non, pitié, pas Hanouna, ni le petit Q, ni surtout encore moins TF1 ou France Inter.  Non, genre Arte, allons-y carrément, soyons totalement fantasques!  Ou alors la Grande Librairie.  Ou alors un truc comme Science en Questions par Etienne Klein, mais à la télé.

Bref, deux voix, l'une assez grave, l'autre un peu plus aigüe, mais rayée, débrayée, enrayée, déraillée par trop d'années de cigarettes et pis autres trucs...

Derrière ces silhouettes assises, de dos, sur des fauteuils tendance (le genre ébénisteries moulées, rembourrées et tétraxylopodes), plein de spots lumineux de divers éclats, comme des dizaines d'étoiles rassemblées, éblouissantes.

Le voilà mon cliché, le voilà.

"- Où en est Macaron?

- Euh, Macaron n'avance pas comme il le devrait, mon cher Etienne.  J'ai pourtant tout ce qu'il faut.  Des week-ends à moi, une équipe qui tourne enfin, une épouse chaque jour plus adorable, mais depuis les beaux jours de l'automne, je n'ai guère écrit qu'une poignées de pages...  Pourtant Macaron va bien, je veux dire, il avance imperceptiblement, je crois qu'aujourd'hui, il est plus proche de la fin que du début.  Mais, ce faisant, il évolue vers une tournure un poil plus politique que la dimension envisagée au départ.  

- Mais alors où est le problème?

- Le problème?  Peut-être de la peur, la peur d'être incompréhensible, donc incompris.  Et puis aussi, il y a un chapitre scientifique à écrire, une sorte d'hommage au Soleil.  Pour que ce chapitre fonctionne, j'ai besoin d'être en contact avec une personne qui rayonne.  Une personne que j'ai toujours assimilée au Soleil.  Le truc c'est qu'elle est aux abonnés absents...  Mais bref, fort heureusement, il n'y a pas que cela à écrire.  Il y a Anja aussi. Il y a leur rencontre, leur amour, passionné, puis lointain, puis réconcilié...  Il y a toutes les révolutions qu'il faudrait pour sauver l'Humanité de catastrophes pourtant annoncées.  Il y a les aventures musicales de la seconde moitié du livre; donc bref il y a de quoi écrire!

- Alors au boulot! 

- Sauf que le problème c'est que je rêvasse...  Dès que le ciel d'hiver se délivre des nuées, mon regard est sitôt attiré.  Capella, Deneb...

- Alors arrêtez de rêvasser à regarder les étoiles!  Regardez plutôt le Soleil!  C'est lui la solution!  Let the sunshine in, don't look up!"

 










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